
Paul Monté est un dessinateur et illustrateur camerounais, né le 25 novembre 1983 au PMI de Ndoungué à Konsamba, dans la région du Littoral, au Cameroun. Il est caricaturiste et l'un des membres fondateurs de l’Association des bédéistes du Cameroun (Abc). Sa passion pour le dessin lui vient dès son jeune âge, et il commence à bien la développer à partir de 4 ans.
Enfant, il vit à Babouantou un petit village de Bafang dans la région de l’Ouest Cameroun. C’est son père, transporteur sur la ligne de Bafang à l’époque qui l’initié à la bande dessinée. Il ramenait à la maison des ouvrages, souvent de vieilles bandes dessinées sans couverture. Paul Monthé se souvient encore des petites folies qu’il se permettaient pour toujours rester en contact avec la Bande Dessinée tandis que ses frères jouaient. « Si c'était des colliers, je les aurais encore aujourd'hui », lance le bédéiste avant de compter cette histoire qui lui fait voler une pièce de 100Fcfa à ses parents. « Un jour, on m'avait envoyé à la boutique acheter du pain. Le boutiquier a pris une feuille de journal où il y avait une page de Lucky Luke. Il l'a coupée en deux, il a emballé mon pain avec une partie. Je mourais d'envie qu'il m'emballe le pain avec le tout, mais je n'avais pas le courage de lui demander. J’avais mal en sortant du bout. Et une idée m'est venue genre, peut-être que si tu reviens acheter du pain très vite, il va utiliser le reste du papier journal. Alors je suis allé voler une pièce de 100 francs et retourné acheter du pain. Heureusement pour moi, ça marchait. J'ai gardé ces deux morceaux ».
Paul Monthé n’avait jamais envisagé faire carrière dans le dessin. C’était pour lui des moments d’évasion pendant lesquels il voyageait à travers les images. A 14ans, suite aux difficultés financières dans sa famille, il est contraint à arrêter ses études secondaires en classe de 5e au Collège évangélique de Bafang. Comme il est doué en dessin, il est conseillé à ses parents de lui payer une formation en Sérigraphie. Chose faite. Paul y va, mais n’y adhérent pas bien qu’il soit considéré dans ce milieu comme le meilleur.
De la Sérigraphie au dessin
Par la suite le jeune homme commence à s’intéresser aux activités liées au dessin. Il participe à des ateliers à l’extérieur de son village et commence à se faire remarquer par son travail. Il va faire larecontre de Willy Valdès Kengne (édudiant à luniversité de Yaoundé 1), avec qui apprend les techniques de base du dessin. Cette feormation va changer la perception qu'il se faisait du dessin restreinte aux mangas chinois.
En décembre 2006, un peu plus affilé dans son travail, il propose ses services de caricaturiste au journal Ouest-Echos et est embauché.En juillet 2008, il est l'invité de Willy Valdès Kengne sur Festival de la Caricature et de l'Humour de Yaoundé et commence à participer de façon professionnelle à partir de 2009. En 2011 il participe à un concours national de la bande Dessinée (BD) à Yaoundé avec l'Ong Zenü Network. L’Ong obtient la 3e grâce aux dessins proposés par les apprenants avec pour thématique la corruption en milieu scolaire. Par la suite l’Ong à demander aux dessinateurs de facturer leurs œuvres. Pour Monthé détient une douzaine (10 au concours et 2 en ateliers). Il facture le tout à 72000 Fcfa soit 6000 Fcfa la pièce. Un montant jugé minimal par des aînés dans le metiers. Lorsque la même occasion s’est produite pour le deuxième fois, le caricaturiste a revu le montant à la hausse. Soit une œuvre à 15000Fcfa (toujours jugé minimal).
Ses travaux apparaissent sur des calendriers. Il commence ainsi à mieux gagner sa vie grâce au dessin. Il collabore avec Yannick Deubou le promoteur du Mboa BD Festival et font « The Camelboy », « Ekiée », « On est ensemble » etc. Il participe à « Rio dos Camaroes », un album collectif réunissant les travaux des dessinateurs camerounais dont Joélle Epee Mandegué. Dans ce collectif des caricaturistes camerounais, il collabore aussi sur un projet de BD avec Joëlle Ebongué, auteur de « La vie de d’Ebène Duta ». Entre temps, Joélle Epee Mandegué, le met en contact avec Vladimir Lentzy, un Français d'origine russe qui intéresse à son travail sur cette BD.
En 2018, il va travailler avec Vladimir Lentzy d’abord dans un atelier de 15 jours au Cameroun, ensuite sur la collection webtoon des éditions Dupuis. Une grande fierté pour le camerounais qui parvenait enfin à surmonter ses difficultés financières accrues suite à sa démission chez Waanda Studio de Yannick Deubou et à une malformation congénitale (spina bifida) dont était atteintes sa première fille à la naissance. L’homme marié et père de 5 enfants aujourd’hui bossait de jour comme de nuit pour survenir aux besoins de sa famille à cette époque. La collaboration avec Vladimr Lentzy lui a permis de se relever. Il a par ailleurs été invité à visiter le siège d'édition Du Puis en Belgique et en France, en 2023.
Paul Monthé a également représenté le Cameroun à la première édition du Forum ICC Créative Afrique, à Paris, en France, d’où est née la collaboration avec l’Institut français du Cameroun (l'IFC) sur la BD. Il participe au lancement officielle de la collection « Moabi » au Bilili Festival au Congo en 2021. (Moabi, c'est un arbre africain dont les racines sont plantées loin dans le sol). Il était également présent à la première édition du forum des ICC (industries culturelles et créatives) "Africa Creative" à Paris.
L’Héritage de la DB
Toujours en 2021, il créée l’Association des bédéistes du Cameroun (Abc) qui édite depuis décembre 2024, le trimestriel KoualaBD, une BD co-écrit par sept auteurs dont Pondy George (président de l’Abc), Andy Corleone Akz, Hugues Biboum, Robert PouGoue, Ole Tsimi, Gunter Moss (un ancien dessinateur 100 % jeune) et Paul Monté. L’objectif de l’Abc est de redonner à la caricature ses couleurs de noblesse. Depuis sa création, les membres travaillent sur un festival de caricatures, des illustrations, dessin de presse écrite, livres scolaires, dessins animés etc.
Paul Monthé aimerait à travers cette initiative, laisser un héritage aux générations futures afin qu’elles sachent que le DB en Afrique n’est pas un mythe. Elle existe contrairement à ce que les européens pensent. D’abord une BD faite par les camerounais et pour les camerounais ensuite pour l’Afrique. Ceci pour faire sortir les africains de la colonisation qui continue à se propager à travers les BD européennes. « L’une de nos idéologies les plus profondes est d’utiliser la bande dessinée comme une arme puissante », fait-savoir.
Même si la sérigraphie reste un épisode traumatisant pour lui, Paul Monthé encourage les jeunes qui, comme lui, n’ont pas terminé les études. Il leur exhorte à ne pas se laisser influencer par la société qui va essayer de les classer dans une catégorie où les opportunités d’emplois se résument aux postes de vigiles, de manœuvres dans un chantier (au quartier) etc. Selon lui, l’école est continuelle. Il a d’ailleurs retrouvé le chemin de l’école mais cette fois en tant qu’instituteur. Dans son parcours, il a enseigné des cours de dessin dans plusieurs établissements dont le Lycée Bilingue de Ngouache, à Bafoussam, dans les classes de 6eme, 5éme, 3éme et Terminale. Il est également quelque fois invité à l'Institut des Beaux-Arts de Foubam pour s’entretenir avec les étudiants et participer à des animations d'ateliers.
Prix et Recompense
En 2025, Paul Monthé cumule 19 ans au service du dessin. En 2005, Paul Monthé reçoit le prix de la meilleure Bande Dessinée par le Comité National de Lutte Contre le Sida (CNLS). En 2012, il est le premier prix dessin au Festival des Jeunes du Cameroun. Il reçoit le Mont d’or de la caricature en 2020 à une récémonie de recompense organisée par Ouest-Echos. En 2024 est décoré de la médaille vermeille et la médaille d’argent par le gouvernement Cameroun cumulant ainsi 19 ans au service du dessin.
Tatiana Kuessie